Décembre 2021

Ventilation et utilisation de capteurs de CO2 dans la commune

Depuis l’été 2020, la commune de Kraainem met à disposition des commerçants, des lieux publics, des églises, des associations … des capteurs de CO2. Depuis septembre 2021, de grands capteurs de CO2 sont également accrochés dans le hall des sports, le réfectoire des écoles, la salle Agora, etc. À l’approche de l’hiver, de plus en plus de personnes vont en effet se rassembler à l’intérieur et une ventilation très régulière est une nécessité absolue pour limiter la propagation du Coronavirus.

Eté 2020 – mars 2021

En conditions normales,
– Nous respirons 450 l d’air par heure, soit 10.8 m3 par 24 h, soit 13 kg…
– Nous émettons par personne 18 l de CO2 par heure
– La concentration [CO2] de l’air extérieur est de 400 ppm (partie par million), soit 0.04%.
– L’air que nous expirons a une concentration [CO2] de 40 000 ppm, soit 4%
– Nous inspirons donc de l’air à min 400 ppm pour le rejeter à 40 000 ppm
– Il y a plusieurs centaines de polluants potentiels dans un bâtiment (peintures, colles, meubles,…), et il est impossible de les mesurer tous. Par contre, on peut ventiler, et utiliser le CO2 comme marqueur
– Dans le cas du COVID, on part du principe que les aérosols sont une source de contamination importante. Une personne contagieuse va émettre des aérosols contaminants, mais également du CO2 en respirant. Si on limite le CO2, on limite donc les risques.

Selon l’Organisation mondiale de la santé (OMS) et le corps médical en général, une bonne ventilation des espaces intérieurs est l’une des mesures de prévention qui permet de limiter la propagation du COVID-19 par les aérosols. Par conséquent, la commune de Kraainem fournit gratuitement depuis l’été 2020 des capteurs de CO2 (*) à destination des espaces accessibles au public. L’utilisation de ces dispositifs permet de déterminer quand une ventilation supplémentaire avec de l’air extérieur est nécessaire, par exemple en ouvrant les fenêtres et les portes. Début mars 2021, nous avions distribué dans la Commune plus de 170 capteurs dans les restaurants, cafés, bâtiments communaux, bureaux de police, magasins, cabinets médicaux, salles de kiné, coiffeurs,…

(*) L’appareil indique la concentration de CO2 (en ppm, “parties par million”, 1% = 10 000 ppm) et donne également des indications de base au moyen de voyants lumineux. Plus les valeurs sont faibles, mieux c’est (on estime que la concentration de CO2 à l’extérieur est d’environ 400 ppm). La question est bien sûr de savoir quel est le niveau “sûr” de CO2, et pendant combien de temps ? A cette question il n’y a pas de réponse claire pour le moment (**). La raison en est qu’il est difficile de dire aujourd’hui quelle dose (= concentration x durée d’exposition, voir le graphique ci-dessous) d’aérosols devient dangereuse, et donc personne ne peut donner une limite (concentration ni durée) sous laquelle la situation des aérosols est sûre à 100%.

Pour l’instant, nous devons donc nous limiter à l’AR de ventilation pour les bâtiments non résidentiels [Nouvelles règles pour la qualité de l’air intérieur dans les locaux de travail – Service public fédéral Emploi, Travail et Concertation sociale (belgique.be)], qui s’élève en fait à 900 ppm pour la plupart des bâtiments. Avec une lumière orange à partir de 800 ppm pour notre capteur de CO2, nous faisons un peu mieux, mais ce n’est certainement pas une garantie de risque 0.

Graphique : Dose = concentration x durée d’exposition [on utilise le CO2 comme marqueur d’une concentration potentielle en virus] : une heure à 2000 ppm est équivalente en termes de « dose » à 8 heures à 600 ppm (en supposant que la concentration extérieure est de 400 ppm). Personne ne sait aujourd’hui si 600 ppm pendant 8 heures est “sûr”, il y a des indications que même 500 ppm ne seraient pas suffisants (***)… Pour info, ce graphique a été établi suite à plusieurs échanges que j’ai eus avec d’anciens collègues (CTSC et Université de Gand) avec qui j’ai passé plusieurs années sur la nouvelle version de l’AR Ventilation lorsque je travaillais comme Conseiller Energie pour la Confédération de la Construction avant de devenir bourgmestre de Kraainem.

(**) Les choses se compliquent dès que l’on tente de définir une limite à respecter pour obtenir une situation “sûre” dans les conditions actuelles. De quoi parlons-nous : quel genre de variant, quel temps d’exposition, le masque porté ou non, le type d’activités,… Toutes sortes de paramètres qui peuvent évidemment jouer un rôle important. Idéalement, nous voudrions pouvoir proposer le type de graphique ci-dessus aux gérants et responsables de bâtiments accessibles au public, le niveau de la courbe dépendrait du secteur d’activités considéré, ainsi que d’autres paramètres mentionnés plus haut.

(***) Le professeur Jimenez de l’université du Colorado, avec lequel nous sommes en contact régulier, recommande de rester en dessous de 700 ppm dans un premier temps, mais dit aussi que même à 500 ppm, il ne peut garantir un risque 0. En revanche, dans les écoles, par exemple, il vaut mieux viser 700 ppm en ouvrant les fenêtres le plus souvent possible, plutôt que les 3000 ppm que l’on trouve classiquement dans de nombreuses établissements…. Nous devons donc nous limiter, du moins pour l’instant, à constater que, si l’on reste dans la zone verte du capteur (qui devient orange à 800 ppm), la ventilation est “meilleure” que ce que la législation prescrit (900 ppm).

Etapes suivantes ?

Dès le moment où on accepte un risque résiduel, on pourrait évidemment envisager la réouverture durable de toute une série d’activités pour autant qu’elles soient strictement encadrées au moyen d’un protocole strict. C’est l’objet de la carte blanche du Professeur Clumeck (entre autres) publiée dans Le Soir du 2021-04-12, et qui prône un label « covid safe ». D’autres labels du même genre sont proposés et vont également dans le sens d’une réouverture de certaines activités et/ou établissements dans de bonnes conditions de sécurité, plutôt que la prise de décision pour des secteurs entiers sans aucune distinction entre ceux qui peuvent assurer le niveau requis de sécurité et les autres.

Il n’y aura probablement pas de solution miracle dans l’immédiat, et toutes les contributions sont les bienvenues. L’ouverture des fenêtres et portes ne pose pas de problèmes particuliers en été, mais dès le moment où les températures chutent, c’est autre chose. C’est alors que des systèmes de filtration et/ou de purification d’air peuvent avoir tout leur sens, pour autant qu’il y ait un feu vert médical [condition sine qua non à mon sens avant de pouvoir envisager une quelconque installation au niveau d’une commune].

Le label « covid safe » est sans nul doute un des éléments du puzzle, mais devra être bien pensé afin d’éviter les situations chaotiques, discussions et conflits en tous genres.

Dans la carte blanche du professeur Clumeck, il est mentionné que les communes pourraient être investies de la responsabilité de conseiller, soutenir et vérifier la conformité « covid safe » des lieux publics. C’est un aspect fondamental parce que le meilleur système n’aura pas beaucoup d’effet si le contrôle et/ou le suivi ne sont pas assurés.